Menu

Rechercher dans ce blog

jeudi 3 septembre 2015

Portrait d'après blessure

Portrait d'après blessure, 
Hélène Gestern, 
Arléa, 240p
Septembre 2014

Alors que j'avais beaucoup aimé le précédent roman d'Hélène Gestern, Eux sur la photo, et pourtant j'étais totalement passée à côté de son roman, sorti pour la rentrée littéraire dernière.

Olivier est historien spécialiste en photographies. Héloïse travaille avec lui sur son émission de télé, elle lui déniche les photos qui serviront de matière aux émissions dans les bibliothèques et les archives. Un midi, alors qu'ils se rendent à un déjeuner, leur rame de métro explose. Et cet événements ne va pas leur causer que des blessures physiques. Un cliché, pris d'eux à la sortie de la catastrophe, une seconde de leur vie volée et exposée en une d'un magazine à sensations, va les bouleverser profondément.
Dans ce roman, Hélène Gestern nous parle du couple, mais pas que. Elle nous parle des blessures, et de la difficile reconstruction de soi quand son corps a été meurtri, mais pas que. Le point sur lequel elle insiste le plus c'est sur le pouvoir des photographies. Elle nous offre à voir les dérives de ces magazines que nous sommes des millions a acheter plus ou moins régulièrement. Ces magazines qui cherchent a gagner de l'argent sans aucun intérêt pour les répercussions que leurs images peuvent avoir sur les gens qu'ils volent. Des magazines qui n'hésitent pas à modifier la vérité, ou a en créer une quand ils ne la connaissent pas, dans une légende qui fera vendre encore plus. 
Et c'est bien de cette blessure là qu'il s'agit dans ce roman. C'est de cette humiliation qu'il est le plus difficile de se remettre pour ses deux héros. Hélène Gestern réfléchie à la notion de liberté de la presse. Peut-on parler de journalisme, quand il s'agit de voler une part d'un individu non consentant et de jeter cette part en pâture au public sans chercher à comprendre la vérité qui se cache derrière? 
"Lisant ces jugements et l'insolente mauvaise foi qui suintait des plaidoiries, je comprenais surtout qu'une mécanique de presse cupide, dont le travail ressemblait plus à un tapin sur le boulevard de l'horreur qu'à du journalisme, détournait à son profit des lois qui n'avaient pas été écrites pour elle; je constatais l'incroyable hypocrisie de cette entreprise (...) prête à vendre la dignité de n'importe qui pour quelques parts de marché, le bon plaisir des actionnaires ou trois grammes de notoriété supplémentaire."

Elle nous interroge sur le bien fondé de toutes ces images qui envahissent totalement notre société, et sur notre rôle de voyeur, nous qui acceptons de les absorber sans sourcilier. 

Ses personnages ne sont plus alors que des victimes.
Victimes car blessés dans leur chair par l'explosion. 
Victimes car blessés psychologiquement par cet acte, que l'on pense terroriste au départ, auquel personne n'est préparé.
Victimes enfin, aux yeux de tous et pour toujours. Car la photo va les exposer médiatiquement dans cette posture, et ceux qui les reconnaîtront penseront toujours, désormais, à cette image du corps brisé d'Héloïse. 
Une image qu'elle refuse, et contre laquelle elle va se battre. 

En parallèle, Hélène Gestern intègre des avis, fictifs, sur des photos qui ont marqués l'Histoire. Des photos journalistiques qui ont illustrés des faits marquants, que des gens interprètent, sur lesquelles ils donnent leurs ressentis. Et on imagine alors le témoignage d'un inconnu sur le cliché montrant Héloïse et Olivier sortant de la bouche du métro. 

Ce roman m'a beaucoup touché. D'abord parce que je l'ai trouvé émouvant, mais aussi, parce qu'il interroge sur notre société de l'image et sur le rôle des journalistes photographes et de leur éthique. J'ai trouvé cette vision d'autant plus forte qu'Olivier travaille sur ce sujet de la photo reporter. Une fois placé au centre de l'image, ses convictions en sont profondément ébranlées.

L'écriture d'Hélène Gestern est plus forte et plus affermie que dans Eux sur la photo. Et son roman n'en est que plus marquant. 

mercredi 2 septembre 2015

Le gardien de l'arbre

Le gardien de l'arbre,
Myriam Ouyessad et Anja Klauss
L'élan vert, 
Collection Pont des Arts
32p, Août 2015
A partir de 5 ans.

Vous connaissez la collection Pont des Arts? Il s'agit d'une collection d'albums jeunesses, édités par l'élan vert, qui offre aux enfants un conte imaginé à partir de l'oeuvre d'un artiste. Un super moyen d'habituer l’œil des plus petits à l'art.
Le nouvel album est magnifique. Bon d'accord je ne suis pas très neutre, puisqu'il s'inspire d'un de mes artistes favoris, Gustav Klimt. Mais tout de même, c'est parfaitement réussi.

En partant du triptyque de la mosaïque murale que Klimt a réalisé pour la salle à manger du palais Stoclet à Bruxelles, les auteurs ont imaginés un conte fabuleux. 
La vieille Minoa garde une graine, qu'elle protège plus que n'importe quel trésor. Un jour elle confie cette graine à Djalil. Ce garçon veille à son tour sur cette graine extraordinaire. Puis un jour, il est prêt pour protéger l'arbre qui en naîtra, l'arbre unique. Il décide donc de la planter. Et l'arbre révèle son secret, des fruits qui permettent de lire l'avenir.

Comme toujours à la fin de l'album, des informations sur l'oeuvre qui a donné l'inspiration aux auteurs, sur l'artiste, et l'album expliqué par ses créateurs.

J'ai beaucoup aimé l'histoire que je trouve très belle et parfaitement accordée à la fresque. Comme si Klimt avait pu imaginer cette histoire en créant son oeuvre. 
Chaque détail de l'oeuvre de Klimt est utilisé dans l'illustration. Des échos se font, comme sur ses toiles, entre les motifs des décors et des personnages. Il y a le même équilibre que dans ses œuvres, et la même couleur dorée. 

Magnifique.