Vie et mort de Sophie Stark,
Anna North,
Autrement, 384p
Sortie prévue le 19 août 2015
Je ne sais pas si le thème est plus récurent sur cette rentrée littéraire, ou si ce ne sont que mes choix qui s'y portent, mais j'ai lu plusieurs romans sur des artistes imaginaires (et pourtant qui ont l'air tellement vrais), ces derniers temps.
Sophie Stark est un personnage bien énigmatique (et souvent agaçant). Née Emily Buckley, elle se lance dans des études de cinéma un peu par hasard. D'abord passionnée par la photo, elle découvre le cinéma grâce à son petit frère. Et là c'est la révélation. Tout ce qu'elle ne peut montrer par la photo, elle le transcende avec une caméra. Durant ses études, elle réalise tout d'abord un court métrage, Daniel, sur le garçon le plus populaire de l'école. Basketteur, fiancé à la reine des étudiantes, beau, adulé. Mais Sophie n'est personne, juste une fille bizarre, l’œil toujours rivé derrière une caméra. A part son frère, elle ne se lie à personne. Totalement asociale, elle souffre de ne comprendre le monde qui l'entoure, de ne savoir décrypter ses semblables. Etoile montante du cinéma indépendant, elle se jette à corps perdu dans sa passion, délaissant son entourage, ceux qui l'aiment et l'adulent pour son art. Le destin d'une étoile filante raconté par ceux qui l'ont aimés et ont partagés des morceaux de sa vie.
Au travers du prisme des regards de ceux qui l'ont véritablement côtoyée - Robbie son frère, Allison son amour passionnel, Benjamin Martin un critique cinématographique passionné par son travail, Jacob son mari, Daniel son amour de jeunesse et muse de son premier court métrage, et George un producteur hollywoodien - se façonne progressivement les différentes facettes de Sophie, cette jeune femme talentueuse et insaisissable.
J'ai d'abord eu un peu de mal avec Sophie. Je ne comprenais pas la fascination qu'elle pouvait exercer sur son entourage. Tous ces gens qui la croisait et auxquels elle portait un intérêt se retrouvaient comme envoûtés, comme si elle possédait une attraction magnétique. Et c'est cette attraction que j'ai eu du mal à cerner. Pour moi Sophie n'est qu'une sociopathe, vampire. Elle absorbe les blessures, les fêlures, les histoires de ceux qui l'intéresse. Elle les digère. Elle les utilise. Puis les offre en pâture au monde sous forme de films. Vampire de douleur, voleuse d'intimité. Et je trouvais ça insupportable.
Et puis, finalement, le livre terminé, il continu de me hanter. Plus d'un mois après l'avoir refermé, Sophie est toujours présente dans mon esprit.
Qu'est-ce qui l'a rend si extraordinaire? Son abnégation au profit de son art. Aucune vie, aucune souffrance, aucune intimité ne peut être si elle n'a pas utilité dans l'art. Et lorsqu'elle pousse les gens à se confier, qu'elle absorbe leur histoire, la mâche, la modèle, ce n'est que dans le but de servir l'Art. Rien d'autre n'a d'importance à ses yeux. Incapable de comprendre les autres, elle est aussi incapable de les aimer s'ils ne peuvent servir son art. Le cinéma est le seul but qu'elle poursuit. Et quand le succès arrive, qu'on lui passe sa première commande, les choses ne se passent pas aussi simplement. Il lui faut donc trouver un nouveau moyen d'illuminer le cinéma.
Ce n'est pas un roman que j'ai apprécié directement. Même si j'aimais bien cette narration chorale, ces personnages qui façonnent tous, de leurs points de vue, cette absente qui hante le roman; je n'avais tellement pas d'empathie pour le personnage de Sophie que la lecture en était difficile.
Et puis finalement, une fois que j'ai pu prendre du recul, digérer ce premier roman traduit d'Anna North, je me dis que, tout de même, il y a quelque chose de grand dans Vie et mort de Sophie Stark.
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